Littérature et chagrin



L’Adieu

J’ai cueilli ce brin de bruyère
L’automne est morte souviens-t’en
Nous ne nous verrons plus sur terre
Odeur du temps brin de bruyère
Et souviens-toi que je t’attends


Guillaume Apollinaire

Extrait du recueil Alcools




Samuel-Joseph AGNON (1888-1970) À la fleur de l’âge (Gallimard, Du monde entier, 2003) traduit de l’hébreu par Laurent Schuman



À la fleur de l’âge est un court roman très sensible. Tirtza, la narratrice, a vu sa mère brûler des lettres peu de temps avant sa mort, à la fleur de l’âge. Tirtza n’aura de cesse de découvrir qui était l’auteur de ces lettres et de comprendre les raisons de la mélancolie de sa mère. Elle exhumera l’amour de celle-ci pour un jeune intellectuel viennois venu se perdre dans une bourgade aux confins de l’empire austro-hongrois.
AGN – 1er étage



Naja Marie AIDT (née en 1963) Si la mort t’a pris quelque chose rends-le. Le livre de Carl (Éditions Do, 2020) traduit du danois par Jean-Baptiste Coursaud



En 2015, Carl, le fils de Naja Marie Aidt, s’est défenestré. À la suite de ce drame, l’auteure danoise compose ce récit hybride et cependant cohérent dans lequel se mêlent des extraits de son journal, des poèmes et des citations d’écrivains. L’aspect fragmentaire du récit (ruptures de tons, typographies diverses) reflète la douleur de Naja Marie Aidt.
839.81 AID – 1er étage



Noga ALBALACH (née en 1971) Le vieil homme. Des adieux (Éditions Do, 2020)
traduit de l’hébreu par Rosie Pinhas-Delpuech



113 chapitres composés d’une seule phrase ou d’un simple paragraphe qui cependant touchent en plein cœur. Noga Albalach relate les derniers mois de la vie de son père, le vieil homme du titre. Cet homme timide, intègre, avocat de profession, qui passa une grande partie de sa vie à rédiger un dictionnaire, a tout oublié. Sa profession, sa femme, son âge. Entre souvenirs et moments d’accompagnement au quotidien qui virent parfois au tragi-comique, Noga Albalach dresse le portrait d’un homme bon.
ALB – 1er étage



Claude ASKOLOVITCH (né en 1962) À son ombre (Grasset, 2020)



« Je dois tromper quelqu’un, mais je ne sais pas qui » écrit le journaliste Claude Askolovitch dans À son ombre, un récit bouleversant mêlant honte et espérance. Dix ans après la mort de son épouse, il met enfin des mots sur son chagrin et sa culpabilité à avoir aimé très vite une autre femme plus jeune et à être de nouveau père. Une mise à nu sincère.
848 ASK – 1er étage



Pierric BAILLY (né en 1982)L’homme des bois (POL, 2017)



Pierric Bailly rend un très bel hommage à son père Christian Bailly, mort après une chute dans une forêt du Haut-Jura : « L’homme des bois n’est pas seulement le récit de la mort brutale et mystérieuse de mon père. C’est aussi une évocation de la vie dans les campagnes françaises à notre époque, ce qui change, ce qui se transforme. C’est l’histoire d’une émancipation, d’un destin modeste, intègre et singulier. C’est enfin le portrait en creux d’une génération, celle de mes parents, travailleurs sociaux, militants politiques et associatifs en milieu rural. »
BAI – 1er étage ou en version numérique ici



Zsuzsa BANK (née en 1965) Mourir en été (Rivages ; Littérature étrangère, 2022)
traduit de l’allemand par Olivier Mannoni



« Les morts ne sont jamais morts, ils ont leur place dans les premières phrases d’une rencontre, d’une discussion, ils sont assis dans les jardins, aux tables, devant les soupières, les corbeilles de pain blanc tranché, ils ordonnent, allons, parlez de moi à présent, ne baissez pas les bras, n’arrêtez pas de parler de moi « . La romancière allemande Zsuzsa Bank passe un dernier été auprès de son père mourant. Elle a écrit ce récit même si « Cela arrive à chacun, chacun meurt et chacun perd un jour ses parents. Ça n’a rien de particulier et ça arrive à tous (…) Pourquoi est-ce que j’en fais quelque chose d’exceptionnel ? Comme si ça n’arrivait qu’à moi ? Ça ne compte pas, que d’autres aient vécu ça avant nous (…) Ce qui compte, c’est que nous le vivions. Nous seuls le vivons ainsi, nous seuls. » Mourir en été est à la fois un récit empreint de tendresse et de violence.
BAN – 1er étage ou en version numérique ici



Russell BANKS (1940-2023) De beaux lendemains (Actes Sud ; Babel, 2007)
traduit de l’anglais (États-Unis) par Christine Le Bœuf



L’accident d’un car scolaire va bouleverser la vie de Sam Dent, une bourgade de l’État de New York. Quatorze enfants meurent et nombre d’autres sont blessés. Russell Banks fait entendre quatre voix, celles de quatre acteurs ou victimes de ce malheur : la conductrice du car, le père de deux enfants tués, une jeune fille handicapée à la suite de cet accident et un avocat venu de New York enquêter sur la cause de cet accident. Cette tragédie fait resurgir les maux cachés de chacun d’entre eux. Russell Banks est un peintre délicat des âmes en souffrance.
BAN – 1er étage



Thibault BÉRARD (né en 1980) Il est juste que les forts soient frappés (L’Observatoire, 2020)



Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils s’aiment follement. Ils ont un enfant et un autre s’annonce. Mais « le vent se lève », Sarah est malade. Par-delà la mort, elle raconte le combat de ce couple face à l’irrémédiable. Dans ce beau mélodrame l’émotion se mêle sans aucune mièvrerie à la rage et à l’humour, remparts nécessaires contre la maladie.
BER – 1er étage ou en version numérique ici



Emmanuèle BERNHEIM (1955-2017) Tout s’est bien passé (Gallimard ; Blanche, 2012)



André Bernheim a 89 ans. Gravement malade, il a choisi de mourir en Suisse. Pour mener à bien ce projet funeste il demande à sa fille de l’aider. Ce qu’elle fait avec toute la force de son amour. Cette histoire d’une fin de vie assistée est avant tout une aventure à rebondissements, rocambolesque, reflétant la personnalité forte et sans concession d’André Bernheim.
BER – 1er étage



Jean-François BILLETER (né en 1939) L’autre Aurélia (Allia, 2017)



Le sinologue suisse Jean-François Billeter tint un journal de 2013 à 2015 afin d’écrire « le passage d’un bonheur à un autre – celui de vivre avec Wen à celui d’avoir vécu avec elle. »
L’autre Aurélia, allusion à l’Aurélia de Gérard de Nerval, est une brève chronique lumineuse qui dit la permanence de l’amour qui l’unissait à son épouse décédée quelques mois auparavant. À lire également Une rencontre à Pékin, le très beau récit sur la naissance de leur amour dans la Chine des années 60.
BIL – 1er étage ou en version numérique ici



Guy BOLEY (né en 1952) Fils du feu (Gallimard ; Folio, 2018)



Évocation délicate et sensible d’une enfance à tout jamais perdue, près du feu de la forge du père. Un jour un drame advint et tout bascula. Un chagrin insurmontable raconté avec simplicité et sensibilité.
BOL – 1er étage ou en version numérique ici



Piedad BONNETT (née en 1951) Ce qui n’a pas de nom (Éditions Métailié, 2017)
traduit de l’espagnol (Colombie) par Amandine Py



« Dani, mon Dani adoré (…) Par ce livre, j’ai tenté de donner un sens à ta vie, à ta mort et à mon chagrin. D’autres que moi érigent des statues, gravent des pierres tombales. J’ai voulu te mettre au monde une seconde fois, dans la même douleur que la première, pour te permettre de vivre encore un peu, de ne pas disparaître de nos mémoires. » Un court récit incandescent de la poétesse colombienne Piedad Bonnett pour dire ce qui n’a pas de nom, le suicide de son enfant.
864 BON – 1er étage



Frédéric BOYER (né en 1961) Peut-être pas immortelle (POL, 2018)



Après la mort tragique de sa compagne, la philosophe Anne Dufourmantelle, l’écrivain et éditeur Frédéric Boyer dit son chagrin et laisse poindre quelque espérance : « J’espère malgré tout que nous pourrons avoir de temps en temps des nouvelles l’un de l’autre. Mais ce n’est pas certain, n’est-ce-pas ? . »
P BOY – 1er étage ou en version numérique ici



Milena BUSQUETS (née en 1972) Ça aussi ça passera (Gallimard ; Folio, 2017)
traduit de l’espagnol par Robert Amutio



Après la mort de sa mère, Blanca se réfugie dans la maison familiale de Cadaquès. C’est là, entourée d’une troupe disparate – ex-maris, fils, amies et amant – qu’elle pense trouver l’apaisement. Mais voilà : « Ma place dans ce monde était dans ton regard et cela me paraissait si incontestable et éternel que je ne me suis jamais inquiétée de vérifier où elle se trouvait » écrit-elle à sa mère dans une lettre imaginaire. D’une apparente légèreté, le premier roman de Milena Busquets mêle le chagrin à une envie de vivre irrépressible.
BUS – 1er étage



Blandine de CAUNES (née en 1946) La mère morte (Stock, 2020)



Trois générations de femmes : Benoîte Groult, la mère, Blandine de Caunes, la fille et Violette, la fille de Blandine. De sa mère, Blandine de Caunes a hérité la force vitale et l’humour. Ce livre est une réconciliation entre trois générations de femmes qui partagent
« le même amour forcené de la vie, toujours plus forte que tout », le credo de Benoîte Groult, credo qu’elle a transmis à sa fille.
848 CAU – 1er étage



Bernard CHAMBAZ (né en 1949) Martin, cet été (Julliard, 2002)



Le 11 juillet 1992, Martin, le fils aîné de Bernard Chambaz, meurt dans un accident en Irlande. Deux années plus tard, l’écrivain publie un récit bouleversant qui dit l’avant et l’après de l’accident « pour ne pas céder à l’hébétude (et parce qu’) il n’y a pas pire peine, il n’y a pas pire, mais il y a les facettes infinies du pire. » Avant, une famille unie et heureuse avec trois fils. Après, la douleur et le chagrin dans lesquels chacun s’enferme, terriblement seul.
CHA – 1er étage



Sophie DAULL (née en 1965) Camille, mon envolée (Le Livre de poche, 2016)



Après la mort soudaine de sa fille Camille âgée de 16 ans, Sophie Daull commence à écrire, s’attelant jour après jour à « la fabrication d’un belvédère d’où Camille et moi pouvons encore, radieuses, contempler le monde. » La complicité, les chamailleries, les fous rires remplacés par le vide et le chagrin sont le fil conducteur du roman. Point d’atermoiement mais une volonté de raconter au plus près les quelques jours où la maladie soudaine et inexpliquée emporta la vie de Camille et, en même temps, celle de ses proches, puis les jours et les mois qui suivront.
DAU – 1er étage



Pauline DELABROY-ALLARD (née en 1988) Ça raconte Sarah (Minuit, 2018)



Une passion qui dévore tout. Deux femmes, l’une est excessive : elle parle trop et trop fort… L’autre, la narratrice, est discrète et se laisse emportée. Une histoire d’amour universelle. Des phrases courtes qui disent sans fioriture l’intensité de la passion et sa fin tragique.
DEL – 1er étage ou en version numérique ici



Joan DIDION (1934-2021) L’année de la pensée magique (Grasset, 2007)
traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Demarty



Joan Didion est l’une des figures des Lettres américaines. Le 30 décembre 2003 son mari, l’écrivain John Gregory Dunne, meurt d’une crise cardiaque. L’année de la pensée magique est un livre autobiographique, un reportage sur le vif sur la douleur, l’incompréhension, l’égarement. Comment continuer à vivre quand tout s’effondre autour de vous ? Peut-être, après des mois de douleur, vient l’apaisement et l’amère constatation que « Nous devons nous défaire des morts, les laisser partir, les laisser devenir la photo sur la table de chevet. »
DID – 1er étage



Olivier DORCHAMPS (né en 1973) Ceux que je suis (Finitude, 2019)



C’est l’histoire d’un père franco-marocain qui meurt à Clichy après avoir demandé à être enterré à Casablanca, sous les orangers. C’est celle de Marwan. L’un de ses fils, narrateur bienveillant, qui va découvrir au Maroc les lourds secrets de l’histoire familiale.
Un premier roman d’une grande sensibilité, teinté d’humour. Prix des lecteurs de la Ville de Paris 2019.
DOR – 1er étage



Federico FALCO (né en 1977) Les plaines (Gallimard ; Scribes, 2023)
traduit de l’espagnol (Argentine) par Antoine Corradi



« Comment écrire parmi les décombres, au milieu de la boue et des flaques, en regroupant ça et là les débris détrempés de ce qui fut un quotidien, de ce qui fut une maison ? Comment écrire une histoire parmi les décombres d’une histoire ? « . Dans les grandes plaines argentines, loin de tout et de tous, le temps de trois saisons, un homme cultive son potager. La contemplation de la nature et le jardinage composent un quotidien qu’il s’évertue à consigner dans des cahiers. Peu à peu des bribes de souvenirs laissent entrevoir les traces laissées par une rupture amoureuse douloureuse. Les plaines est le roman d’une lente reconstruction au milieu d’une nature qui se veut apaisante.
FAL – 1er étage



Lydia FLEM (née en 1952) Comment j’ai vidé la maison de mes parents (Seuil ; La Librairie du XXIème siècle, 2004)



Psychanalyste, Lydia Flem offre ici un récit profond, empreint de pudeur et d’émotion, de sa propre expérience du chagrin et du difficile devoir d’héritage qu’il comporte : vider la maison de ses parents. Que faire de ses objets ? Comment faire face à l’histoire et aux souvenirs qui y sont liés ?
155.9 FLE – 2ème étage ou en version numérique ici



Jérôme GARCIN (né en 1956) Mes fragiles (Gallimard, 2023)



La plupart des écrits du journaliste et écrivain Jérôme Garcin évoquent les êtres aimés disparus tels son père et son frère jumeau. Sa mère et son frère Laurent, décédés à quelques mois de distance, hantent les pages de Mes fragiles. En dressant un portrait délicat et affectueux de chacun d’eux, Jérôme Garcin espère l’apaisement : « Plus le temps passe et plus je crois à la présence des morts. Ils sont là, leur âme demeure, plane et s’obstine. »
848 GAR – 1er étage



Stéphane GERSON (né en 1967) Disaster Falls (Alma, 2020)
traduit de l’anglais (États-Unis) par Thomas Grillot



Disaster Falls est un passage de rapides sur la Green River entre l’Utah et le Colorado.
C’est dans ces eaux qu’Owen le fils âgé de 8 ans de l’historien Stéphane Gerson se noya lors d’une descente en kayak. Si l’écriture de Disaster Falls reflète l’expérience de la douleur du père et de sa famille, elle est bien plus que cela. En entremêlant l’histoire de cette rivière tumultueuse avec celle de la communauté juive de Minsk dont son grand-père partit pour rejoindre les États-Unis, Stéphane Gerson écrit une chronique anthrolopologique et intimiste. Et cherche à donner sens à la mort de son fils.
155.9 GER – 2ème étage ou en version numérique ici



Aliona GLOUKHOVA (née en 1984) Dans l’eau je suis chez moi (Verticales, 2017)



Aliona Gloukhova a 11 ans en 1995 lorsque son père disparaît mystérieusement lors du naufrage d’un voilier au large de la Turquie. Son corps ne sera jamais retrouvé. Des années plus tard, s’appuyant sur de rares documents concrets et d’autres inventés, l‘auteure dessine un portrait fantasmé de cet homme déjà brisé bien avant sa disparition. Aliona Gloukhova a écrit un beau roman autobiographique à l’écriture fine et poétique sur l’empreinte que chacun laisse à ses proches en héritage.
GLO – 1er étage ou en version numérique ici



Philippe JOANNY (né en 1968) Quatre-vingt-quinze (Grasset, 2023)



Les trithérapies naîtront un an plus tard, l’espoir aussi. Mais en cette année 1995
« Ils tombent les uns après les autres et on les laisse tomber. » Parmi eux Alex, un ami de Philippe Joanny. Alors Philippe redonne vie à Alex afin qu’il ne tombe pas dans l’oubli comme tant d’autres.
95 entremêle le récit des jours après sa mort et les témoignages de ceux qui l’ont aimé.
Un chant d’amour poignant empreint d’une folle rage de vivre.
JOA – 1er étage



Pierre JOURDE (né en 1955) Winter is coming (Gallimard, 2017)



En mars 2014, Gabriel, 20 ans, le fils de l’écrivain et critique Pierre Jourde meurt d’un cancer. « Il a encore loin à aller, jusque-là où jamais il n’aurait pensé pouvoir aller. Et nous non plus, nous n’aurions jamais imaginé qu’il nous serait réservé de nous avancer, pas à pas, jusque dans ces régions qu’on aurait cru n’exister que sur les toiles des vieux maîtres, celles qui représentent des descentes de croix au fond desquelles un ciel obscur se déchire. »
848 JOU – 1 er étage ou en version numérique ici



Maylis de KERANGAL (née en 1967) Réparer les vivants (Gallimard ; Folio, 2015)



Vingt-quatre heures. Il faudra vingt-quatre heures pour que le cœur de Simon, 20 ans, devienne celui de Claire, 50 ans. Ce sont ces heures décisives que Maylis de Kérangal s’attache à conter avec minutie dans Réparer les vivants, un roman choral bouleversant. Vingt-quatre heures au cours desquelles une famille effondrée et des médecins devront prendre des décisions douloureuses et agir pour sauver une vie.
KER – 1er étage ou en version numérique ici



Esther KINSKY (née en 1956) Le bosquet : roman de terrain (Grasset ; En lettres d’ancre, 2020) traduit de l’allemand par Olivier Le Lay



On ne saura presque rien de M. si ce n’est qu’il est la source d’un immense chagrin pour la narratrice. À présent le monde de cette dernière « se conjugue sur le mode de l’absence ».
Elle se rend à Olevano, un village italien où elle devait séjourner avec M. Puis viendront les souvenirs de séjours à Chiavenna et Comacchio. Trois lieux, trois temps, trois itinéraires hors des sentiers battus, au milieu d’une nature réparatrice, dans lesquels le cheminement avec les morts aimés s’avère apaisant.
KIN – 1er étage



Sara Jaramillo KLINKERT (née en 1979) Comment j’ai tué mon père (Stock ; La Cosmopolite, 2022) traduit de l’espagnol (Colombie) par Anne Plantagenet



« Je ne savais pas qu’on tuerait mon père. Aucun enfant ne peut imaginer une chose pareille. Mais ça arrive. J’ai encore du mal à croire qu’à peine trente-cinq grammes d’acier et un gramme de poudre aient pu détruire une famille. Je l’atteste pourtant. Ils ont détruit ma famille. »
Le père de la romancière colombienne a été assassiné par un tueur à gages alors qu’elle avait 11 ans. Jusqu’alors la fillette vivait heureuse dans un milieu privilégié, au sein d’une famille aimante. Trente années plus tard, Sara Jaramillo Klinkert dissèque dans une langue sobre et douce le délitement sans fin des siens avec, en arrière-plan, une Colombie gangrénée par la mafia. Déchirant.
KLI – 1er étage



Jean-Marie LACLAVETINE (né en 1954) Une amie de la famille (Gallimard, 2019)



Alors qu’elle se promenait sur les rochers de la Chambre d’amour à Biarritz avec son fiancé et son frère Jean-Marie, Annie Laclavetine fut emportée par une vague et disparut à tout jamais. Cinquante années plus tard, dans un récit intime et poignant, Jean-Marie Laclavetine met fin à l’étouffant silence entourant la mort de sa sœur. S’appuyant sur des correspondances, des photographies et autres souvenirs, il redonne vie à celle qui, à force de silences dévastateurs, était devenue une simple amie de la famille sur les photographies familiales. À la suite de la publication de ce récit, Jean-Marie Laclavtine reçut de nombreux témoignages. Il conçut donc, en quelque sorte, une suite avec La vie des morts (Gallimard, 2021).
LAC – 1er étage ou en version numérique ici



Emmanuelle LAMBERT (née en 1975) Le garçon de mon père (Stock, 2021)



Sur la couverture du récit Le garçon de mon père, il y a la photo d’une fillette au regard et au sourire si doux. C’est cette même fillette devenue jeune femme qui accompagne son père mourant. Emmanuelle Lambert dresse un tendre portrait de cet homme tant aimé en cinq chapitres qui correspondent aux cinq derniers jours de sa vie. « Ici, ce n’est pas le deuil qui commande, et je serais bien en peine de faire un portrait de mon père sans penser qu’il est faux. Écrire  » il était » ou  » il fut  » ,c’est forcément mentir en choisissant l’angle qui immobilise et annule ce qui nous tient vivants, mobiles, agiles, nos métamorphoses au fil des jours. »
848 LAM – 1er étage



Emmelene LANDON (née en 1963) Debout (Gallimard ; Blanche, 2022)



Si Marie-Galante relatait les jours heureux, Debout raconte l’après du 2 janvier 2018, jour de l’accident de voiture qui emporta l’un et laissa l’autre seule. Comment faire pour rester debout quand celui que vous aimez est tué sous vos yeux ?
Compagne de l’éditeur Paul Otchakovsky-Laurens, Emmelene Landon nous dit dans quinze carnets lumineux sa vie sans l’être aimé, mais toujours présent. Peintre, auteure, cinéaste, elle recompose son existence sans lui, faite de voyages au long cours, de rencontres et d’amitiés fortes.
LAN – 1er étage ou en version numérique ici



Nathalie LÉGER (née en 1960) Suivant l’azur (POL, 2020)



« Les larmes ne viennent pas du souvenir, elles ne viennent pas de tout ce qui est perdu, (…) les larmes viennent de ta solitude et de ta souffrance impartageables, les larmes, ce sont celles de mon ignorance, de l’impossible partage. » En 71 pages poignantes, la romancière Nathalie Léger laisse libre cours à sa douleur après la mort de son mari, le dramaturge Jean-Loup Rivière.
848 LEG – 1er étage ou en version numérique ici



Mathieu LINDON (né en 1955) Hervélino (POL, 2021)



Ils s’étaient rencontrés chez Michel Foucault en 1978. Leur amitié prit fin en 1991 à la mort d’Hervé Guibert. Trente années plus tard, Mathieu Lindon choisit d’évoquer son ami Hervélino lors de leur séjour à la Villa Médicis à Rome à la fin des années 80. Très vite, la joie et la légèreté font place à la tragédie. Hervé est malade et va mourir. « Écrire sur Rome, c’est passer sur tout ce sur quoi je n’ose pas écrire parce que c’est trop compliqué de m’approprier Hervé.  » Hervélino  » est le portrait de notre amitié. »
848 LIN – 1er étage ou en version numérique ici



Hisham MATAR (né en 1970) La terre qui les sépare (Gallimard ; Du monde entier, 2016) traduit de l’anglais par Agnès Desarthe



L’œuvre d’Hisham Matar reflète son obsession, la quête du père. Opposant à Khadafi, Jaballa Matar disparut dans les geôles libyennes en 1990. Quand en 2011 la révolution libyenne éclate, Hisham Matar se rend en Libye en quête d’improbables retrouvailles. En vain. « On l’avait d’abord emprisonné puis, lentement, comme du sel qu’on dissout dans l’eau, on l’avait fait disparaître. » La terre qui les sépare est le fruit de cette enquête douloureuse et infructueuse. Hisham Matar est « un endeuillé sans tombe » nous livrant un récit bouleversant.
MAT – 1er étage ou en version numérique ici



Jean-Michel MAULPOIX (né én 1952) L’hirondelle rouge (Mercure de France, 2017)



« Lorsque mon père et ma mère disparurent, j’écrivis L’hirondelle rouge, livre dans lequel j’évoquais la fin de leur vie et cherchais à la douleur une issue. Mais la parution de cette suite de proses ne mit pas un terme au travail de deuil : j’écrivis encore, durant plusieurs mois, des pages, parfois violentes, où je devais aussi bien continuer de creuser la plaie d’angoisse ouverte par la perte de mes parents que formuler avec plus de force ce désir de vivre dont l’apparition rêvée d’une hirondelle rouge avait un temps figuré le retour» Ainsi, après L’hirondelle rouge, est né Le jour venu qui aida le poète Jean-Michel Maulpoix à accéder à une sorte de paix.
844 MAU – 1er étage ou en version numérique ici



Laurent MAUVIGNIER (né en 1967) Loin d’eux (Minuit ; Double, 2002)



Jean le père, Marthe la mère, Luc le fils. Ces trois-là s’aimaient sans jamais avoir su ou pu se le dire. À force de silences, Luc s’est enfui deux fois. La première fois pour aller travailler à Paris, la seconde pour mettre fin à ses jours. Deux ans après sa mort, six voix – celles du père, de la mère, d’un oncle, d’une tante, d’une cousine aimée et même la sienne propre – disent l’incompréhension, la culpabilité, le chagrin face à ce drame.
Lors de sa parution en 1999, ce premier roman de Laurent Mauvignier fut très remarqué. Il garde aujourd’hui toute sa force.
MAU – 1er étage ou en version numérique ici




Colum McCANN (né en 1965) Apeirogon (Belfond, 2020)
traduit de l’anglais (Irlande) par Clément Baude



Un apeirogone est une forme géométrique au nombre infini de côtés.
Colum McCann s’est inspiré de cette figure pour construire un roman puzzle aux mille et un fragments tourbillonnants avec en son cœur deux hommes endeuillés. Bassam le Palestinien et Rami l’Israélien, dont les filles ont été tuées, unissent leurs forces pour témoigner de leur vie et de leurs convictions. S’inspirant d’une histoire vraie, Colum McCann dit : « Je voulais m’introduire dans la tête et le cœur de ces personnages admirables. En mélangeant fiction et non-fiction, j’essaie d’aller au plus profond de ce qui est vrai et de ce qui ne l’est pas. Puisque la vérité est confuse, nous devons parfois inventer de nouvelles formes d’expression et c’est ce que j’ai fait avec Apeirogon. »
MAC – 1er étage ou en version numérique ici



Joyce Carol OATES (née en 1938) J’ai réussi à rester en vie (Philippe Rey, 2011)
traduit de l’anglais (États-Unis) par Claude Seban



Avec L’année de la pensée magique, Joan Didion avait exploré de manière clinique et néanmoins déchirante la mort de son mari et l’après. Quatre ans plus tard en 2011, la romancière Joyce Carol Oates écrit elle aussi un récit de veuvage dans lequel l’incrédulité fait vite place à la solitude et à l’art de sauver les apparences. Un récit bouleversant au plus près de la douleur et de l’absence dans lequel l’humour est quelque peu salvateur.
Un récit dans lequel « la veuve habite une histoire dont elle n’est pas l’auteure. »
818 OAT – 1er étage



Yaël PACHET (née en 1968) Le peuple de mon père (Fayard, 2019)



Journal de deuil ? Roman familial ? Yaël Pachet mêle subtilement les deux en rendant hommage à son père, l’écrivain et intellectuel Pierre Pachet, un homme discret qui avait lui-même écrit une biographie sur son propre père. Un livre très délicat, intimiste, qui dit l’amour d’une fille pour son père.
PAC – 1er étage



Anne PAULY (née en 1974) Avant que j’oublie (Verdier ; Chaoïd, 2019)



C’est le roman d’une réconciliation, celle d’une jeune femme, l’auteure, avec son père, qui vient de mourir. C’est le roman de la vie paternelle. Avec des voix féminines qui éclairent une vie somme toute banale. Une écriture où le tragicomique le dispute au chagrin.
PAU – 1er étage et en version numérique ici



Alain RÉMOND (né en 1946) Tout ce qui reste de nos vies (Seuil, 2013)



Ce ne sont que de petits ouvrages d’à peine plus d’une centaine de pages mais, au fil des années, le journaliste et chroniqueur Alain Rémond a construit une belle œuvre autobiographique autour d’êtres chers et disparus. Tout ce qui reste de nos vies dit l’amour puis le désamour de ses parents et la mort d’une sœur adorée.
Alain Rémond livre son enfance et sa jeunesse dans un village breton avec simplicité et justesse.
REM – 1er étage



David RIEFF (né en 1952) Mort d’une inconsolée : les derniers jours de Susan Sontag (Climats, 2008) traduit de l’anglais (États-Unis) par Marc Weitzmann



L’intellectuelle américaine Susan Sontag meurt en décembre 2004. Deux années après sa disparition son fils, David Rieff, témoigne des derniers moments vécus auprès de sa mère.
« Les gens disent que l’on s’approfondit dans l’épreuve. Je ne me sens pas approfondie, je me sens aplatie,  je suis devenue opaque à moi-même […] Y a t-il moyen de faire de tout ceci une libération ?» confiait-elle à son journal. Au-delà de la détresse décrite, cet ouvrage propose une réflexion sur l’impuissance à venir en aide à un être cher qui va mourir.
810 RIE – 1er étage



Jean ROUAUD (né en 1952) Pour vos cadeaux (Minuit ; Double, 2008)



Voici le portrait d’Annick Frégeau épouse Rouaud, mère de Jean, devenue veuve du « grand Joseph » au lendemain du Noël 1963. Jean Rouaud rend un vibrant hommage à ce petit bout de femme énergique, qui faisait claquer ses petits talons et qui sut, par le travail et l’amour porté à ses enfants, surmonter la mort de l’homme de sa vie. « Elle ne lira pas ses lignes, la petite silhouette ombreuse. » Jean Rouaud lui dit tout son amour avec une tendresse malicieuse.
ROU – 1er étage



George SAUNDERS (né en 1958) Lincoln au Bardo (Fayard, 2019) traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Demarty



Washington, nuit du 25 février 1865. Dans le cimetière de Oak Hill près de la Maison Blanche, le Président des États-Unis, Abraham Lincoln, anéanti par le chagrin, se recueille sur la sépulture de son jeune fils. C’est alors que des âmes en peine, sorties des caveaux, prises au piège entre deux mondes, entre trépas et renaissance  – le bardo de la tradition bouddhiste – vont se livrer bataille. Lincoln au Bardo est un roman choral déroutant, audacieux dans lequel George Saunders convoque plus de 160 récitants qui expriment les maux de l’Amérique.
SAU – 1er étage



Giani STUPARICH (1891-1961) L’île (Verdier ; Verdier poche, 2006)
traduit de l’italien par Gilbert Bosetti



Accompagné de son fils, un père malade retourne sur son île natale pour ce qui sera son dernier voyage. L’île, longue nouvelle publiée en 1942, est un chef-d’œuvre.
Dépouillée de toute fioriture et toute en intériorité, l’écriture de Giani Stuparich bouleverse profondément. À l’instar d’Italo Svevo, Umberto Saba ou encore Claudio Magris, Giani Stuparich fait partie des grands écrivains triestins.
STU – 1er étage



Beata UMUBYEYI MAIRESSE (née en 1979) Tous tes enfants dispersés (Autrement, 2020)



Comment surmonter l’indicible ? Trois voix, trois générations. Dans un roman choral dans lequel elle « soulève le couvercle du chagrin », Beata Umubeyeyi Mairesse raconte une famille en lambeaux des années après le génocide au Rwanda en 1994.
En mêlant des mots rwandais au français, dans une langue sobre où la douceur l’emporte, elle nous emmène vers l’apaisement d’une famille.
UMU – 1er étage ou en version numérique ici



Violette d’URSO (née en 2000) Même le bruit de la nuit a changé (Flammarion, 2023)



Lorsque Luigi d’Urso meurt en 2006, sa fille Violette a 6 ans. Douze années plus tard elle invente Anna, un double romanesque qui part en quête de ce père méconnu.
Même le bruit de la nuit a changé relate cette recherche qui va la mener en Italie et jusqu’à Naples, berceau de la famille paternelle. Au cours de son périple, elle va découvrir les nombreuses parts d’ombre de cet homme excentrique et autodestructeur.
« J’aimais une création de mon esprit – en circuit fermé. » Violette d’Urso livre un premier roman autobiographique qui fait voler en éclats des secrets de famille. Et qui la révèle à elle-même.
URS – 1er étage ou en version numérique ici



Manuel VILAS (né en 1962) Ordesa (Éditions du Sous-sol, 2019)
traduit de l’espagnol par Isabelle Gugnon



Dans ce récit intimiste, passionné et foisonnant, Manuel Vilas livre un double portrait, celui de sa famille (plus particulièrement de son père et de sa mère) et celui de l’Espagne franquiste des années 1960-1970 : « Je parle d’autres êtres, des fantômes, des morts, de mes parents morts, de l’amour que j’ai eu pour eux, du fait que cet amour ne part pas. »
VIL – 1er étage ou en version numérique ici



Richard WAGAMESE (1955-2017) Les étoiles s’éteignent à l’aube (Éditions 10-18, 2017)
traduit de l’anglais (Canada) par Christine Raguet



Un fils accompagne son père dans son dernier voyage au cœur de la montagne en Colombie Britannique. Cheminant au sein d’une nature sauvage, Franklin et Eldon Starlight vont s’apprivoiser. Teinté des croyances de la nation indienne Ojibwé à laquelle appartient Richard Wagamese, Les étoiles s’éteignent à l’aube, au souffle romanesque indéniable, est un éblouissant roman sur la transmission.
Richard Wagamese, décédé en 2017, mettra de nouveau en scène Franklin Starlight dans Starlight, son ultime roman resté inachevé.
WAG – 1er étage ou en version numérique ici



Myriam WATTHEE-DELMOTTE (née en 1954) Dépasser la mort : l’agir de la littérature (Actes Sud, 2019)



Pour l’universitaire et critique Myriam Watthee-Delmotte : « C’est grâce aux mots que l’on cesse d’être seul face à la mort. Mais d’abord, ils manquent : quand la mort s’abat, elle abasourdit, elle frappe de mutité. C’est alors que les écrivains peuvent venir en aide et répondre au besoin de faire sens pour que quelque chose soit sauvé du gouffre. »Elle propose des sources de consolation sous formes de lectures.
844 WAT – 1er étage



Walter D. WETHERELL (né en 1948) Un siècle de novembre (Les Allusifs, 2004)
traduit de l’anglais (États-Unis) par Lori Saint-Martin et Paul Gagné



Juge et cultivateur de pommes sur une île près de Vancouver, Charles Maden est un honnête homme respecté. Sa femme vient de succomber à la grippe espagnole et il apprend la mort de son fils unique sur le front en Belgique. Dans un mouvement soudain, il traverse l’Atlantique pour se rendre sur les traces de ce fils aimé qui lui a échappé. Comme des centaines d’autres partis à la recherche, qui d’un fils, qui d’un père, qui d’un frère, Charles Maden erre tel un fantôme sur la ligne de front, exposé aux obus encore intacts, à la boue, au découragement, mais mû par une volonté farouche de voir là où son fils est tombé. Dans un décor de fin du monde, sa quête est parsemée de rencontres qui vont le réconcilier avec lui-même.
WET – 1er étage



Valérie ZENATTI (née en 1970) Dans le faisceau des vivants (L’Olivier, 2019)



Il était romancier. Elle était sa traductrice. Mais elle était bien plus qu’une passeuse de l’œuvre du grand Aharon Appelfeld. Après la mort de ce dernier, ne pouvant se résoudre à la disparition de leur amitié et de leurs échanges, Valérie Zenatti écrit Dans le faisceau des vivants un vibrant hommage à son ami et à son travail d’écrivain.
Elle séjournera même à Czernowitz, ville natale d’Appelfeld, où celui-ci vécut une enfance heureuse avant l’anéantissement : « J’ai marché dans sa ville, des visages et des bâtisses se sont nichées en moi, je pourrai m’y replier quand je voudrai, où je voudrai, ce sera si bon de vivre en sachant que je porte Czernowitz en moi, j’y ai trouvé ce que je ne cherchais pas, ce qui était là, entre lui et moi, sous une autre forme, et j’ai un peu moins peur de ce que signifie vivre sans lui. »
848 ZEN – 1er étage et en version numérique ici

Nous vous invitons à découvrir cette riche bibliographie sous sa forme imprimable ici. Vous pourrez y glaner d’autres oeuvres se rapportant à ce thème.







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