[Bibliographie] Littérature & vie ouvrière

Au tournant des années 1930 apparut une littérature dite prolétarienne avec Henry Poulaille en figure de proue. Pour ce dernier, un auteur prolétarien se devait d’être né de parents ouvriers ou paysans, être autodidacte et témoigner dans ses écrits des conditions d’existence de sa classe sociale.

Aujourd’hui, ces impératifs n’ont plus lieu d’être. Mais la condition ouvrière demeure toujours l’un des thèmes importants de la littérature. Qu’il s’agisse d’écrire au nom des ouvriers ou de raconter sa propre expérience, ces écrits romanesques ou militants disent la souffrance des corps et des âmes, si peu le plaisir.

Selon le Bureau international du travail, en 2019 en France, 5,3 millions de personnes en emploi (soit 20%) sont des ouvriers. Huit ouvriers sur dix sont des hommes, la part des femmes étant la plus élevée parmi les non qualifiés.

Ces femmes et ces hommes, souvent invisibles et silencieux, nous les retrouvons dans les récits autobiographiques et les romans présentés dans cette bibliographie subjective, ouvrages très majoritairement contemporains.

Les écrits que nous vous proposons de découvrir se trouvent sur les rayonnages de la médiathèque.

J’ai passé ma vie là, dans ce laminoir
Mes poumons, mon sang et mes colères noires
Horizons barrés là, les soleils très rares
Comme une tranchée rouge saignée sur l’espoir
 
On dirait le soir des navires de guerre
Battus par les vagues, rongés par la mer
Tombés sur le flan, giflés des marées
Vaincus par l’argent, les monstres d’acier
 
J’voudrais travailler encore, travailler encore
Forger l’acier rouge avec mes mains d’or
Travailler encore, travailler encore
Acier rouge et mains d’or
 
Bernard Lavilliers
(Les mains d’or)
 

Les habiles, les jongleurs de mots sont plus éloignés de la poésie
que cet homme qui – sans parole aucune –
se défait de sa journée, le regard levé vers un arbre
ou le cœur attentif à la voix d’un ami.

Andrée Chedid

(Terre & Poésie)
 

La scierie : récit anonyme (Éditions Héros-Limite, 2013)   « C’est surtout pour ça, pour épater les sales cons du pays que je ne veux pas caler, pour leur faire voir que je suis capable de faire n’importe quoi pour gagner ma vie et garder la maison. Mais je paye cette obstination. J’ai les mains en sang, le poignet foulé, j’ai froid ». En recherche d’un emploi avant d’effectuer son service militaire, le narrateur, d’origine bourgeoise, trouve du travail dans une scierie. Son témoignage brut, sans concession pour le travail difficile et les hommes qu’il côtoie fut publié en 1953, réédité par les Éditions Héros-Limite en 2013.   SCI – 1er étage  

Christian ASTOLFI (né en 1958) De notre monde emporté (Le Bruit du monde, 2022)   « À l’image de mes camarades, à chaque fois qu’on me posera la question, je ne dirai jamais que je travaille aux Chantiers, mais que j’en suis. Comme on est d’un pays, d’une région, avec sa frontière. » Ainsi parle Narval, ouvrier, comme le fut son père, aux Chantiers navals de la Seyne-sur-Mer. Ce monde sera emporté à la fin des années 80 au nom de la rentabilité. Les ouvriers si fiers de leur travail auront double peine, la perte de leur travail et la maladie due à l’amiante : « Tout cela su depuis des décennies, étalé au grand jour comme un linge mouillé. » Un récit sobre magnifiant la dignité du monde ouvrier.   AST – 1er étage  

Michèle AUDIN (née en 1954) Oublier Clémence (Gallimard ; L’Arbalète, 2018)   « Clémence Janet est née le 2 septembre 1879 à Tournus (Saône et Loire). Sa mère était couturière et son père tailleur de pierres. Elle était ouvrière en soie. Elle s’est mariée le 27 février 1897 à Lyon (5e arrondissement) et a donné naissance à deux enfants, Antoine (29 août 1897-14 septembre 1897) et Louis (13 février 1900-23 juin 1977). Elle est morte à Lyon (2e arrondissement) le 15 janvier 1901. » À partir de ces quelques lignes d’état-civil, retraçant la brève existence d’une ouvrière oubliée des livres d’histoire, Michèle Audin redonne vie à Clémence Janet dans un texte poétique et politique. AUD   1er étage

Marguerite AUDOUX (1863-1937) Marie-Claire suivi de L’atelier de Marie-Claire (Grasset ; Les cahiers rouges, 2008)   Marguerite Audoux connut tardivement le succès avec Marie-Claire, un roman autobiographique couronné par le Prix Femina en 1910. Elle y racontait son enfance douloureuse. L’atelier en est la suite bien que non considérée comme telle par l’auteure. Dans le Paris de la Belle Époque, Marie-Claire travaille dans un atelier de couture. Elle est l’une de ces besogneuses qui trime pour survivre et qui ne peut s’épanouir, étouffée par le patriarcat de l’époque. La plume toute en retenue de Marguerite Audoux n’est ni politique, ni revendicatrice. Elle donne simplement vie à des destins modestes. Là réside toute sa force. AUD – 1er étage  

Silvia AVALLONE (née en 1984) D’acier (Liana Levi, 2011) (traduit de l’italien par Françoise Brun) Il y a le ciel, le soleil et la mer et l’île d’Elbe si proche et cependant si lointaine. Car Piambino, ville ouvrière toscane, vit au rythme du dernier haut-fourneau encore en activité. D’acier, premier roman de Silvia Avallone, à la fois récit social et d’apprentissage, fit sensation lors de sa parution en Italie. Son portrait d’une classe ouvrière où les pères sombrent et dérivent, les mères démissionnent et les jeunes s’adonnent à la drogue et à l’alcool, reste celui d’une Italie qui a perdu ses illusions. Et les rêves de Francesca et Anna, deux adolescentes voulant, quel que soit le prix à payer, échapper à un avenir précaire et tout tracé, prendront-ils forme ?   AVA – 1er étage  

Claire BAGLIN (née en 1998) En salle (Editions de Minuit, 2022) Claire, une étudiante employée chez Mac Donald, décrit son travail quotidien. En parallèle, elle raconte son enfance et son adolescence dans un milieu ouvrier. Ces deux mondes ne se rejoignent-ils pas ? Une écriture précise, sans afféterie, un humour distancié pour dire la répétition des gestes qui se doivent d’être efficaces. Un premier roman percutant. BAG – 1er étage  

Thierry BEINSTINGEL (né en 1958) Dernier travail (Fayard, 2022)   En 2019, l’entreprise Orange et trois de ses dirigeants étaient condamnés pour harcèlement moral institutionnel. Suicides et dépressions des employés avaient fait la une des journaux quelques années auparavant. Thierry Beinstingel, qui a longtemps travaillé dans cette entreprise, revient sur ces faits. Si son roman Retour aux mots sauvages fut « écrit à chaud » en 2010, avec Dernier travail, « il (lui) a semblé qu’il était temps de revenir sur ces événements avec plus de distance. » À travers son personnage principal, Thierry Beinstingel revient sur ce qui le hante : « De quoi aurais-je pu m’apercevoir à l’époque ? », « Ai-je failli dans mon éthique ?»   BEI – 1er étage  

Jeanne BENAMEUR (née en 1952) Les insurrections singulières (Actes Sud, 2010) Les insurrections singulières, ce sont celles d’Antoine, un ouvrier en perdition sentimentale et sociale, ballotté entre révolte et résignation. Un voyage à Monlevade au Brésil, où l’usine dans laquelle il travaillait a été délocalisée, lui offrira de nouvelles espérances. Dans ce roman à la fois intimiste et dénonciateur des ravages de la mondialisation, Jeanne Benameur dépeint un homme à fleur de peau, décidé à retrouver sa dignité.   BEN – 1er étage  

John BERGER (1926-2017) La cocadrille : nouvelles (Seuil ; Points, 1996) (traduit de l’anglais par Janine Tanner, Serge Grunberg et l’auteur (prose) et par Gérard Mordillat (poèmes)) L’écrivain, journaliste, peintre et critique d’art anglais John Berger était un homme d’engagements. Il vécut une quarantaine d’années dans un village savoyard auprès des paysans. C’est ainsi qu’il décrivit leur quotidien dans une trilogie intitulée Dans leur travail. La cocadrille, qui en fait partie,dépeint le travail à la ferme mais aussi les paroles fortes et les rites. Au centre de ces histoires, il y a celle de Lucie Cabrol dite la cocadrille, petite bonne femme disgracieuse qui vivra librement en dépit de tous. « Je ne savais rien de ce monde, j’avais honte, ils ont été mes professeurs » avouait John Berger.   BER – 1er étage

  Arno BERTINA (né en 1975) Des châteaux qui brûlent (Verticales, 2017)   Un abattoir de volailles mis en liquidation judiciaire. Un secrétaire d’État séquestré par les ouvriers qui occupent les lieux et qui veulent sauver leurs emplois à tout prix : « On est la misère dont ils se sont moqués ». Arno Bertina, tel un documentariste, fait vivre avec ferveur les doutes, les indignations, les heurts et autres espérances des différents protagonistes face aux aberrations de l’économie mondialisée. BER – 1er étage    

François BON (né en 1953) Sortie d’usine (LGF ; Le Livre de poche, 2006)   Publié en 1982, le premier roman de François Bon « s’impose comme un coup de force » selon Pierre Bergounioux. Sur une période de quatre semaines, François Bon y décrit par le menu le quotidien aliénant d’un ouvrier : le départ le matin à l’usine et la journée de travail. Le bruit assourdissant, la puanteur, le rythme soutenu, les accidents facteurs de mutilations restent encore aujourd’hui l’ordinaire des ouvriers. Aucun effet d’écriture pour décrire le vide, la vie gâchée.   BON – 1er étage    

François BON (né en 1953) Daewoo (LGF ; Le Livre de poche, 2006)   Fin 2002, trois usines du groupe coréen Daewoo, implantées en Lorraine, ferment brutalement jetant sur le pavé des centaines d’ouvriers, principalement des femmes. Se saisissant de cette violence, François Bon voulut en faire un projet théâtral qui se transforma en écriture romanesque : « Ce n’est pas un livre prémédité : il s’agissait de jouer une pièce de théâtre. Et puis, à cause des visages, pour la densité des mots en partage, je décide d’écrire. Si les ouvrières n’ont plus leur place nulle part, que le roman soit mémoire. » et parce que « Daewoo c’est un crime social. La logique du fric remplaçant la logique industrielle ou le « faire » des hommes, c’est une question qui nous traverse tous. »   BON – 1er étage

  Kevin CANTY (né en 1953) De l’autre côté des montagnes (Albin Michel ; Terres d’Amérique, 2018) (traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne Damour)   « Un groupe d’hommes sort de l’entrée du puits. Ils ressemblent à des photos de guerre, hébétés, le visage noirci. Ils ont vu des choses qu’ils n’auraient pas dû voir. Ils les voient encore. » 1972, Silverton, une petite ville de l’Idaho. S’inspirant d’un fait historique, Kevin Canty dépeint avec une profonde humanité les sentiments des rescapés et des endeuillés après un accident mortel survenu dans une mine d’argent. Il donne vie à une communauté soudée, dure à la tâche, qui vit à l’écart du monde. Comment ne pas être touché par ces personnages emplis d’incertitude et de désarroi qui ne réussiront pas, ou si peu d’entre eux, à franchir les montagnes pour vivre une autre vie.   CAN – 1er étage

  Luisa CARNÉS (1905-1964) Tea rooms (Éditions La Contre-allée, 2021) (traduit de l’espagnol par Michelle Ortuno)   Lors de sa parution en 1934, Tea rooms de la journaliste et auteure communiste Luisa Carnés est chaleureusement reçu par la critique. Cette chronique, en vingt-deux scénettes, du quotidien des employées d’un salon de thé madrilène, dévoile la misère, la précarité et les luttes de la classe ouvrière dans une Espagne en pleine crise économique. Journaliste militante et défenseure de la cause républicaine, Luisa Carnés doit s’exiler au Mexique en 1939. Tea rooms est republié en Espagne en 2016. Il connaît alors un succès public et critique et fait sortir de l’oubli cette auteure féministe. CAR – 1er étage  

Didier CASTINO (né en 1966) Après le silence (Liana Levi ; Piccolo, 2016)   Monologue d’un homme simple et digne, ouvrier syndicaliste aux Acieries & Fonderies du Midi qui aimait son travail, mort écrasé par un moule de plusieurs tonnes. La voix passe, de manière très subtile, du père à son fils. Celui-ci, encore enfant à la mort de son père, héritier d’une image magnifiée de la figure paternelle, n’a de cesse de se défaire de cet héritage. En vain.   CAS – 1er étage

Stéphanie CHAILLOU (née en 1969) L’homme incertain (Éditions Alma, 2015)   C’est l’histoire d’un homme qui rêvait d’une vie simple. Avoir une ferme, une femme qui l’aime, des enfants. Cultiver la terre. En somme, être heureux. Mais le rêve se brisa net dans les années 70 lorsque la politique agricole commune fit son apparition et emporta tout sur son passage : la ferme, les bêtes, les champs et l’espoir. En un long monologue, cet homme nous livre le récit d’une vie tiraillée entre désarroi et culpabilité. D’une vie qu’il pense ratée. En contrepoint de ce témoignage, s’entend une voix douce et si présente, celle des enfants du fermier qui, telle une comptine, évoque les jours heureux à la ferme.   CHA – 1er étage    

Sorj CHALANDON (né en 1952) Le jour d’avant (Grasset, 2017)   Quand le 27 décembre 1974, 42 mineurs meurent au fond de la fosse 3 dite Saint-Amé à Liévin, Sorj Chalandon est journaliste à Libération. Ces morts dues à des négligences de la sécurité vont le marquer à jamais. Aujourd’hui écrivain, Sorj Chalandon rend hommage à ces mineurs en entremêlant mémoires intime et collective. Michel Flavent, son héros, dont le frère est mort un jour après ses compagnons d’infortune, va ourdir sa vengeance pendant des années et s’autoproclamer justicier.   CHA – 1er étage    

Olivier CHANTRAINE (né en 1971) Un élément perturbateur (Éditions Gallimard, 2017)   Serge Horowitz est l’élément perturbateur du cabinet dédié à l’évasion fiscale dans lequel il est employé grâce à son frère, ministre de l’Économie. Hypocondriaque, sujet à des crises d’aphasie et doté d’une maladresse légendaire, il n’a pas son pareil pour dire les choses en face et, en l’occurrence, faire échouer la concrétisation d’un gros contrat. C’est avec une férocité jubilatoire, avec un anti héros épatant, qu’Olivier Chantraine dénonce une certaine conception de l’entreprise.    CHA – 1er étage

  CHI LI (née en 1957) Triste vie (Actes Sud ; Babel, 2005) (traduit du chinois par Shao Baoquing) Vingt-quatre heures dans la vie de Yin Jiahou, ouvrier dans une entreprise métallurgique. Un témoignage brut et cependant poignant, teinté d’ironie sur une vie ordinaire, bien loin du cliché du héros prolétarien. Les illusions de Yin ont été vite balayées par un quotidien laborieux fait de petites brimades et autres déceptions familiales. Publié en 1987, Triste vie a fait la notoriété de Chi Li, l’une des représentantes du courant littéraire néoréaliste chinois. Il fut traduit en français en 2001. CHI – 1er étage  

Mohammed DIB (1920-2003) Le métier à tisser (Seuil ; Points, 2001)                     Publié en 1957, Le métier à tisser est le troisième volet de la trilogie Algérie. Omar, le jeune personnage de La grande maison et de L’incendie, a grandi et fait son apprentissage dans un atelier de tisserands. L’adolescent, déjà bien malmené par la vie, y découvre l’ampleur de la misère et la difficulté d’espérer quand on est écrasé par le labeur. Le métier à tisser, beau roman réaliste, dit la profonde sensibilité de Mohammed Dib envers les humiliés. DIB – 1er étage  

Mary DORSAN (née en 1960) Le présent infini s’arrête (POL, 2015)   720 pages qui décrivent le présent infini du quotidien d’une infirmière psychiatrique et de l’équipe qui l’entoure dans un appartement thérapeutique, auprès d’adolescents atteints de troubles psychiatriques, sans repère familial et affectif, ou si peu. La vie donc : la cuisine, le jardinage, les sorties culturelles. La vie avec son lot d’émotions, d’exaspérations, de découragement, de douceur, de rires, de larmes, de cris, de douleurs, mais avant tout de violence. 720 pages qui disent l’extrême difficulté d’être, d’être à soi, d’être aux autres. Mais aussi un roman dans lequel la couleur d’un ciel, la lecture d’un roman, un fou rire illuminent la vie.   DOR – 1er étage  

  Stéphanie DUPAYS (née en 1978) Brillante (Mercure de France, 2016) Claire, trentenaire brillante et comblée, travaille comme cadre dans une grande entreprise. Image parfaite de la jeune cadre dynamique dont la vie professionnelle se confond avec la vie privée. Mais bientôt, tout va se fissurer. Elle va se retrouver ostracisée par sa hiérarchie. À l’incompréhension vont se mêler le déni et le mensonge face à ses proches. Stéphanie Dupays dresse une satire du monde du travail en s’appuyant sur les mots du marketing. DUP – 1er étage  

Claire ETCHERELLI (1934-2023) Élise ou la vraie vie (Gallimard ; Folio, 2006)   Claire Etcherelli travailla dans une usine automobile à Paris pendant quelques mois. Elise ou la vraie vie a pour toile de fond cette expérience vécue en pleine guerre d’Algérie. Son héroïne, Elise, découvre le travail à la chaîne. Elle va vivre une histoire d’amour fugace avec Arezki, un ouvrier, militant pour l’indépendance de l’Algérie. Revenue dans sa province, elle s’interrogera sur le mystère de la vraie vie : « Ce que nous avions à défendre, ce que nous devions conquérir, nous le laissons derrière nous.» Ce roman reçut le prix Femina en 1967. En 1970, Michel Drach s’inspira du roman de Claire Etcherelli pour son film du même nom avec Marie-José Nat et Mohamed Chouikh.   ETC – 1er étage  

Thomas FLAHAUT (né en 1991) Les nuits d’été (L’Olivier, 2020)   Les nuits d’été, c’est la fin d’un monde, celui de la fermeture de l’usine dans laquelle Mehdi et Thomas travaillent et où leurs pères ont trimé toute leur vie. Des pères qui avaient rêvé d’une autre vie pour leurs fils, loin des objectifs de rentabilité, loin de l’aliénation à une machine. Les nuits d’été, ce sont également les nuits où se conjuguent alcool, shit et rap. C’est aussi et surtout le poids des héritages familiaux. Thomas Flahaut dit les rêves et les désillusions de la jeune génération, peut-être plus fragile que celle de leurs parents.   FLA – 1er étage

GAUZ (né en 1971) Debout-Payé (Le Nouvel Attila, 2014) Choses vues par Ossiri, un Ivoirien sans papier, tour à tour vigile aux Grands Moulins de Paris, à la boutique Camaïeu à la Bastille et au Sephora des Champs-Elysées. Ossiri est un « debout-payé », un de ces vigiles payés chichement à rester debout toute la journée. Ce roman, empreint de dérision et de mélancolie, est également, sous la forme d’un récit autobiographique, un visage de l’immigration africaine en France.   GAU – 1er étage  

Michael GOLD (1893-1967) Juifs sans argent (Nada Éditions, 2018) (traduit de l’anglais (États-Unis) par Romain Guillou) Publié en 1930, Juifs sans argent est le seul roman du journaliste et militant communiste Mike Gold, chef de file de la littérature prolétarienne américaine. En dressant un portrait réaliste de la vie des habitants du Lower East Side, quartier miséreux de New York, au début du XXème siècle, Gold connaît un succès sans précédent. Il y décrit son enfance dans ce « ghetto sur la terre de la Liberté éclairant le monde. » Le rêve américain n’est plus que chimère pour toutes les familles ayant fui la misère de leurs pays, entassées dans des taudis et qui se tuent à la tâche. Les personnages, perdants magnifiques, sont inoubliables. Après la Seconde Guerre mondiale, à cause de son inexorable soutien à l’Union soviétique, Gold sera l’une des victimes de la chasse aux sorcières anticommuniste. « De figure de proue, il devint paria » écrit Solomon Bovshover dans un avant-propos fort édifiant. GOL – 1er étage  

Munir HACHEMI (né en 1989) Les saisonniers (Stock ; La Cosmopolite, 2022) (traduit de l’espagnol par Anne Plantagenet) Partis faire les vendanges dans le sud de la France, quatre étudiants espagnols vont vite se retrouver à vacciner des poulets élevés en batterie, à gaver des canards ou encore à injecter de drôles de substances à des plants de maïs… Leur amitié et leurs idéaux vont en prendre un sacré coup. Dans cette autofiction délirante, illustrée de références littéraires et cinématographiques, le jeune écrivain madrilène Munir Hachemi dénonce les ravages de l’agriculture et de l’élevage intensifs. Il est devenu vegan pour toujours.   HAC – 1er étage

Frank HARRIS (1856-1931) La bombe (Le Livre de poche. Biblio roman, 2020) (traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne-Sylvie Homassel)   Chicago, Haymarket Square, 4 mai 1886. Lors d’un meeting rassemblant des centaines d’ouvriers, alors que la police lance un assaut, une bombe explose faisant nombre de morts et blessés. Rudolph Schnaubelt, un jeune homme cultivé, sans le sou, découvre la tragique condition des ouvriers. Avec ce roman publié pour la première fois en 1908, le journaliste et écrivain Frank Harris revenaitsur un épisode majeur des luttes sociales et politiques, à l’origine du 1er Mai.   HAR – 1er étage  

Nikos KAVVADIAS (1910-1975) Le quart (Gallimard ; Folio, 2008) (traduit du grec par Michel Saunier)   Le quart est une histoire d’hommes, d’hommes grecs, du moins portant des noms grecs. Leur cargo, rouillé, sans âge, vogue sur des mers inhospitalières. À bord, un vacarme assourdissant, une odeur nauséabonde, des rats crevés. Il faut tenir malgré la peur. Alors, les marins s’inventent des lendemains qui ne viendront jamais. Ils se souviennent de pays et de ports lointains. Ils se remémorent les femmes, mères et putains. Ils se racontent leurs histoires de cœur et d’honneur, dans lesquelles, parfois, leurs identités se confondent. Des histoires, souvent pleines de passion, parfois cruelles, racontées de manière très crue, avec un langage puissant. Le quart, publié en 1954, est le seul roman écrit par le poète grec Nikos Kavvadias.   KAV – 1er étage

Maylis de KERANGAL (née en 1967) Naissance d’un pont (Gallimard ; Folio, 2011)   C’est avec Naissance d’un pont que Maylis de Kerangal connut son premier grand succès. Un roman architectural dans lequel nombre de personnages œuvrent à la construction d’un pont gigantesque dans une ville imaginaire en Californie. « Il s’agit d’une sorte de western, autrement dit d’un roman de fondation, et la référence à ce genre cinématographique opère dans le texte, l’écriture travaille en plan large, brasse du ciel, des paysages, des matières, des hommes, et resserre sa focale sur les héros qui sont toujours pris dans l’action, dans la nécessité de répondre à une situation. » Une épopée portée par un souffle épique. KER – 1er étage

John KING (né en 1960) White trash (Éditions Au diable vauvert, 2014) (traduit de l’anglais (Angleterre) par Clémence Sebag)   Avec White trash publié en 2001, John King – le Ken Loach jusqu’au-boutiste de la littérature anglaise – pourfend avec rage le système de santé de son pays. White trash entremêle deux voix, celles d’une infirmière compassionnelle et d’un administratif chargé de réduire les frais de l’hôpital dans lequel elle travaille. Cette satire mordante sur le démantèlement des services sociaux britanniques va vite prendre les allures d’un « roman noir puissant sur la fracture sociale. »   KIN – 1er étage  

Takiji, KOBAYASHI (1903-1933) Le bateau-usine (Allia, 2015) (traduit du japonais par Évelyne Lesigne-Audoly)   Années 1920, Mer d’Okhotsk, au nord du Japon. Embarqué pour une campagne de pêche aux crabes, l’équipage du Hakkô-Maru va vivre l’enfer. L’intendant du bateau, obsédé par le rendement, n’hésite pas à martyriser les marins. Ceux-ci, mal nourris, vivant au milieu de la vermine, vont finir par s’unir et se révolter. Publié en 1929, Le bateau-usine, chef-d’œuvre de la littérature prolétaire et contestataire, fut longtemps censuré. Son auteur, Kobayashi Takiji, mort sous les coups de la police politique japonaise, dénonçait avec ferveur l’impérialisme tout puissant.   KOB – 1er étage  

Tom KROMER (1906-1969) Les vagabonds de la faim (Seuil ; Points, 2004) (traduit de l’anglais (États-Unis) par Raoul de Roussy de Sales)   Les vagabonds de la faim, description de la vie de vagabond qu’endura Tom Kromer pendant la Grande Dépression paraît en 1934 sous le titre original Waiting for nothing. Unique roman de ce journaliste qui cessa d’écrire en 1937, il fut redécouvert en 1986. Dans cette chronique désabusée relatant des années de faim et d’errance, d’astuces désespérées pour obtenir là un café, ici un morceau de pain rassis ou une paillasse pouilleuse pour une nuit, le travail est un mirage. Seul comptent le présent et la misère qui colle à la peau. Philippe Garnier, préfacier éclairé, rappelle que la traduction de 1936 est due à Raoul de Roussy de Sales, un diplomate français, qui traduisit à merveille le style dépouillé et brutal de Kromer.   KRO – 1er étage

Nathalie KUPERMAN (née en 1963) Nous étions des êtres vivants (Gallimard ; Folio, 2011) « Cela faisait maintenant une année entière que nous étions à vendre. Nous avions peur de n’intéresser personne, peur du plan social. On attendait le grand jour, le jour des pleurs, des adieux, et peut-être éprouvions-nous quelque plaisir à rendre poignantes, par avance, ces heures où nos vies basculeraient, où nous serions tous dans le même bateau, agrippés les uns aux autres avant de nous quitter pour toujours. Et puis, un jour, alors que nos habitudes avaient repris le dessus et que nous continuions à travailler comme si de rien ne devait advenir, on nous a réunis pour nous annoncer qu’un acquéreur potentiel était en pourparlers. » Nathalie Kuperman donne la parole à des employés confrontés au rachat de leur entreprise de presse. Face à un repreneur sans scrupule, la résignation ou la colère semblent si dérisoires.   KUP – 1er étage  

Marie-Hélène LAFON (née en 1962) Joseph (Buchet-Chastel, 2014)   Joseph est ouvrier agricole dans une ferme du Cantal. Bientôt, il sera à la retraite. Joseph est célibataire, disons plus joliment qu’il n’a pas « fait maison ». C’est un taiseux. Peut-être n’a-t-il pas les mots pour dire les fermes dans lesquelles il a travaillé, les bêtes, les bois, la femme aimée partie il y a bien longtemps de cela. Marie-Hélène Lafon donne vie à un homme au cœur simple et à un monde qui disparaîtra sans doute avec lui.   LAF – 1er étage  

Xavier LE CLERC (né en 1979) Un homme sans titre (Gallimard, 2022)   « Si tu étais si attaché à ta carte d’ouvrier, c’est sans doute parce que tu étais un homme sans titre. Toi qui es né dépossédé, de tout titre de propriété comme de citoyenneté, tu n’auras connu que des titres de transport et de résidence. Le titre en latin veut dire l’inscription. Et si tu étais bien inscrit quelque part en tout petit, ce n’était hélas que pour t’effacer. Tu as figuré sur l’interminable liste des hommes à broyer au travail, comme tant d’autres avant toi à malaxer dans les tranchées. » L’hommage sobre d’un fils à son père mutique et illettré ayant grossi les rangs des ouvriers venus d’Algérie.   LEC – 1er étage

Jean-Pierre LEVARAY (né en 1955) À quelques pas de l’usine (Chant d’orties, 2008)   L’auteur libertaire de Putain d’usine livre avec À quelques pas de l’usine dix-huit nouvelles qui sont autant d’instantanés de la vie de laissés-pour-compte qui vivotent à l’ombre de l’usine qui les employait. « Le peu de gens qui les avaient connus les oublièrent vite. C’est pourquoi j’avais quand même envie de vous en toucher deux mots » dit Jean-Pierre Levaray qui en dresse de beaux portraits empreints d’émotion, de tendresse et d’humanité.   LEV – 1er étage

  Iain LEVISON (né en 1963) Tribulations d’un précaire (Liana Levi ; Piccolo, 2015) (traduit de l’anglais (États-Unis) par Fanchita Gonzalez-Batle)   « Au cours des dix dernières années, j’ai eu quarante-deux emplois dans six États différents. J’en ai laissé tomber trente, on m’a viré de neuf, quant aux trois autres, ç’a été un peu confus. Sans m’en rendre compte, je suis devenu un travailleur itinérant, une version moderne de Tom Joad des Raisins de la colère. À une différence près, Tom Joad n’avait pas fichu quarante mille dollars en l’air pour obtenir une licence de lettres. » Iain Levison dresse un portrait cinglant d’une Amérique des précaires, porté par une écriture hilarante.   LEV – 1er étage    

Edouard LOUIS (né en 1992) Qui a tué mon père (Seuil, 2018)   « Je fais l’histoire du corps de mon père à travers l’histoire de la politique française, de toutes les réformes, de toutes les lois, de tous les discours des gouvernements successifs.» Dans son troisième roman en forme de réquisitoire, tout en mêlant politique et souvenirs personnels, Édouard Louis s’adresse à son père et s’interroge sur la violence sociale et politique qui soumet les corps des ouvriers.   LOU – 1er étage      

Franck MAGLOIRE (né en 1971) Ouvrière (Points, 2012)   Nicole Magloire travailla trente années à l’usine Moulinex de Caen jusqu’à sa fermeture en 2001. Son témoignage pudique, mis en mots par son fils écrivain, révèle sa vie d’ouvrière au corps meurtri, mais également la camaraderie, les leitmotivs du patronat et ceux des syndicats et la révolte vaine quand la fermeture tombe comme un couperet. Nicole Magloire est une femme simple et digne. Son témoignage l’est tout autant.   MAG – 1er étage  

    Nicolas MATHIEU (né en 1978) Connemara (Actes Sud, 2022)   Après Aux animaux la guerre et Leurs enfants après eux, Connemara est le troisième roman de Nicolas Mathieu ayant pour toile de fond la désindustrialisation de la Lorraine. Connemara met en scène Hélène et Christophe. Si Christophe est resté dans son village et mène une vie simple, Hélène, quant à elle, s’est élevée socialement en s’éloignant et en subissant humiliations et misogynie. Leurs retrouvailles éphémères, tel un pont jeté entre le passé et le présent, leur permettront–elles de reprendre souffle ?   MAT – 1er étage  

    Colum MCCANN (né en 1965) Les saisons de la nuit (10-18, 2000) (traduit de l’anglais (Irlande) par Renée Kérisit)   Avec Les saisons de la nuit, l’écrivain irlandais Colum McCann, installé à New-York, présente deux destins à des époques différentes, celui, au début du XXème, d’un jeune terrassier noir lors de la construction du métro new-yorkais et celui, contemporain, d’un sans-abri qui vit dans les tunnels de ce métro. Au lecteur d’imaginer le lien qui les unit.   MAC – 1er étage      

Thierry METZ (1956-1997) Le journal d’un manœuvre (Gallimard ; L’Arpenteur, 1990)   « Midi me ramène toujours au plus clair, à une façon d’être qui se contente d’un peu d’eau, de pain et de quelques mots ». Puis vient la reprise du travail : « Alors, on se tait parce que, soudain, tout devient utile ». L’écriture poétique de Thierry Metz – qui fut manœuvre – éclaire le quotidien fait de dur labeur et le rend lumineux.   848 MET – 1er étage    

  Georges NAVEL (1904-1993) Travaux (Gallimard ; Folio, 1979) L’œuvre de Georges Navel n’est guère impressionnante par son volume, quatre récits et Travaux, un roman autobiographique publié en 1945. Écrit à partir de notes prises au fil des ans à l’usine et lors de ses multiples travaux saisonniers – il fut berger, cueilleur de lavande, de fruits, ouvrier dans les salines de Hyères, terrassier – Georges Navel s’attache à écrire chaque geste et sentiment avec une apparente simplicité et une « bonne foi tranquille » selon Giono. Travaux est un récit réaliste, sobre et empreint de poésie. « Mon but dans la vie est en somme impossible, c’était d’arriver à l’enchantement. J’appartiens à une couche sociale qui n’a rien dit, et mon rôle dans la vie sera de fleurir, de dire. »   NAV – 1 er étage  

  Hiroko OYAMADA (née en 1983) L’usine (Christian Bourgois, 2021) (traduit du japonais par Silvain Chupin)   Une usine si grande qu’on trouve en son cœur une forêt, des routes, des cantines et des restaurants, des banques. Dans cette ville-usine, lieu d’un travail répétitif et ennuyeux, trois employés ne comprennent pas le sens de leur labeur. Avec L’usine, la romancière japonaise Hiroko Oyamada s’interroge avec virtuosité et une pointe de réalisme magique sur le sens du travail.   OYA –1er étage  

Laurent PETITMANGIN (né en 1965) Ce qu’il faut de nuit (La Manufacture de livres, 2020)   Trois vies modestes, celles d’un père et de ses deux fils. Le père raconte leur quotidien avec une sobriété qui nous émeut. Il y est question d’amour filial et d’engagement politique dans une Lorraine désindustrialisée. Cette confession écrite dans une langue apparemment simple mais vibrante est bouleversante.                   Prix du premier roman des lecteurs de la Ville de Paris 2021 PET – 1er étage    

Joseph PONTHUS (1978-2021) À la ligne : feuillets d’usine (La Table ronde, 2019)   Les feuillets d’usine de Joseph Ponthus connurent un grand succès lors de leur parution en 2019. L’ouvrier intérimaire témoignait de ses emplois dans des conserveries de poissons et des abattoirs bretons. Sa narration particulière, toute en vers libres et sans ponctuation, soulignait le rythme infernal du travail : « Il n’y a pas de temps pour mettre de jolies subordonnées. Les gestes sont machinaux et les pensées vont à la ligne. » L’écriture lui permet donc de tenir et de témoigner : « On entend qu‘il n’y a plus de classe ouvrière. C’est plutôt qu’il n’y a plus de conscience ouvrière. Le capitalisme a triomphé (…) On ne dit plus ouvrier, mais opérateur de production ; on ne dit plus chaîne mais ligne… Cette euphémisation des termes dit quelque chose. » Ce roman reçut plusieurs prix dont le Prix du premier roman des lecteurs de la Ville de Paris 2019.   PON – 1er étage  

  Catherine POULAIN (née en 1960) Le grand marin (Points, 2017)   Le grand marin, premier roman de Catherine Poulain, inspiré de sa vie, paraît en 2016 et récolta nombre de prix. Lili, son héroïne et son double, plaque tout et part en Alaska. Engagée dans des campagnes de pêche, elle va partager le rude travail des matelots qui, une fois à terre, ne songent qu’à repartir. Catherine Poulain avait besoin d’aller « au bout du monde, sur la Grande Bleue, vers le cristal et le péril. » Elle y a bourlingué dix années.   PON – 1er étage    

Catherine POULAIN (née en 1960) Un cœur blanc (L’Olivier, 2018) Deux ans après le succès du Grand marin, Catherine Poulain s’inspire à nouveau de son expérience de saisonnière pour Un cœur blanc dont l’héroïne a pour nom Rosalinde. Celle-ci loue ses bras dans les vignes et les vergers en Provence. Elle a pour compagnons d’infortune des Marocains, des Algériens. Ces âmes et ces corps fatigués qui rêvent sans y croire à d’autres horizons, connaîtront-ils un jour l’apaisement ? POU – 1er étage  

Jean-Luc SEIGLE (1955-2020) Femme à la mobylette (Flammarion, 2017)   À la mort de Jean-Luc Seigle, son éditeur dit : « Il laisse une œuvre forte et généreuse qui a séduit de nombreux lecteurs en cherchant à s’approcher au plus près de la vérité et de la grandeur des marginaux, des laissés-pour-compte et des victimes de l’histoire. » Reine, la femme à la mobylette, fait partie de ceux-là, de ces silencieux. Cette femme modeste va reprendre espoir grâce à une vieille mobylette, retrouver un travail et même un nouvel amour jusqu’à ce que… Ni misérabilisme, ni condescendance dans le regard de Jean-Luc Seigle sur Reine, une femme qui n’a de cesse de rester digne dans l’adversité.   SEI – 1er étage    

Ousmane SEMBÈNE (1923-2007) Les bouts de bois de Dieu (Pocket, 2001)   En 1947, les cheminots de la ligne « Dakar-Niger » engagèrent une grève afin d’obtenir les mêmes droits que les cheminots français. Ils réussirent à faire plier l’administration coloniale malgré une répression féroce. Ousmane Sembène s’est emparé de ce combat pour souligner la force de ces « bouts de bois de Dieu » ainsi que se surnommaient les ouvriers. À travers une multitude de personnages, Sembène rend hommage à ces hommes et à ces femmes qui n’hésitèrent pas à se battre pour leurs droits et leur dignité. Les bouts de bois de Dieu fut publié en 1960.   SEM – 1er étage  

Alan SILLITOE (1928-2010) Samedi soir, dimanche matin (L’Échappée, 2019) (traduit de l’anglais par Henri Delgove)   Toute la semaine, Arthur Seaton, 21 ans, trime à l’usine. Alors, quand arrive le week-end, il se défoule en faisant la tournée des pubs et en se jetant dans les bras de ses amantes. Le dimanche est parfois plus calme avec des parties de pêche en solitaire. Si le roman de Sillitoe relate la rébellion d’un jeune ouvrier, son véritable sujet dénonce les ravages du capitalisme industriel et le désenchantement de la génération d’après-guerre aspirant à plus de libertés. Alan Sillitoe, issu de la classe ouvrière, fait partie dans les années 50 du mouvement contestataire des « Angry Young Men » (Jeunes gens en colère). Samedi soir, dimanche matin, publié en 1958, en est une des œuvres majeures et valut à son auteur la notoriété.   SIL – 1er étage  

Upton SINCLAIR (1878-1968) La jungle (Le Livre de poche. Biblio, 2011) (traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne Jayez et Gérard Dallez)   En 1906, la parution de La jungle provoqua un scandale retentissant. Le romancier et journaliste socialiste Upton Sinclair dévoilait les effroyables conditions de travail et de production dans les abattoirs de Chicago aux mains des trusts de la viande. Le scandale fut si grand que le président Theodore Roosevelt dut engager une commission d’enquête et une nouvelle réglementation fut votée. La jungle, réquisitoire cinglant, n’a rien perdu de sa force plus de cent ans après sa publication.   SIN – 1er étage  

Lucienne SINZELLE (née en 1927) Mon Malagar (Gallimard ; Haute enfance, 2001)   Fille d’un ouvrier agricole, Lucienne Sinzelle passa son enfance – marquée par la pauvreté et l’inceste – à Malagar, la propriété légendaire de la famille Mauriac. Soixante ans plus tard, elle en livre un témoignage âpre et émouvant grâce au soutien de Jean Mauriac, l’un des fils de l’écrivain. François Mauriac apparaît, sur la terrasse de Malagar, silhouette si proche et cependant si distante, si lointaine des conditions de vie des paysans à son service. 848 SIN – 1er étage

Martine SONNET (née en 1955) Atelier 62 (Le Temps qu’il fait, 2008)   En 1951, Amand Sonnet, artisan forgeron-tonnelier dans l’Orne, devient ouvrier aux forges des Usines Renault de Billancourt, Atelier 62. L’historienne Martine Sonnet dresse un portrait bouleversant de son père, Amand, “un homme réfractaire”. Nourri d’archives personnelles et de celles de Renault, son récit, à valeur sociologique, marie avec sensibilité mémoires familiale et collective et rend hommage à toute une génération d’ouvriers ayant œuvré dans l’industrie automobile. Et ce, jusqu’à la fin de Billancourt où “ne tiennent même pas debout tous seuls les derniers vestiges de la forteresse ouvrière.”   848 SON – 1er étage  

J.D. VANCE (né en 1984) Hillbilly élégie (Globe, 2017) (traduit de l’anglais (États-Unis) par Vincent Raynaud)   Hillbilly élégie décrit de l’intérieur l’Amérique de Trump. En racontant son enfance dans le Midwest, là ou l’industrie du charbon et de la métallurgie a disparu, là où les « petits Blancs », les « hillbilly », autrement dit les « péquenauds », se retrouvent sans travail et votent pour Trump, J.D. Vance dresse une véritable chronique sociale sur le déclin de la classe ouvrière blanche américaine. Hillbilly élégie eut un retentissement considérable lors sa parution aux États-Unis. Depuis, le transfuge de classe J. D. Vance, devenu avocat, a été élu sénateur républicain de l’Ohio avec le soutien de Trump.   VAN – 1er étage  

Sophie VAN DER LINDEN (née en 1973) La fabrique du monde (Buchet-Chastel, 2013)   « Et je me vois là, dans tout ça. Une petite Chinoise de 17 ans, une paysanne, partie à l’usine parce que son grand frère entrait à l’université. Quantité des plus négligeables, petite abeille laborieuse prise au piège de sa ruche. Enfermée là pour une éternité. » Petite main parmi des milliers d’autres dans une usine de textile chinoise, Mei s’échappe par le rêve et aspire à l’amour. La fabrique du monde, premier roman poétique et délicat de Sophie Van Der Linden, révèle l’enfer du travail dans ces usines qui produisent à bas coût.   VAN – 1er étage

Frédéric VIGUIER (né en 1968) Ressources inhumaines (Albin Michel, 2015)   Un hypermarché dans une zone commerciale. Suivant une hiérarchie immuable, il y a un directeur, des chefs de secteur et de rayon, de simples employés et des stagiaires. Et il y a Elle, qui, entrée à l’âge de 22 ans, a gravi les échelons de manière fulgurante en utilisant les moyens les plus vils. Frédéric Viguier, qui a travaillé dans la grande distribution, dénonce rageusement le profit érigé en système, un monde impitoyable dans lequel la moindre humanité se paye très cher.   VIG – 1er étage  

Yánnis D. YÉRAKIS (1887-1971) Pêcheurs d’éponges (Cambourakis, 2020) (traduit du grec par Spiro Ampélas)   Au cours des années 1960, au soir de sa vie, Yánnis Yérakis, ancien pêcheur nu d’éponges, écrit cette terrible expérience vécue dans sa jeunesse. Natif de la petite île grecque de Kalymnos, il connut la pauvreté, l’exil forcé en Russie dans des bagnes industriels pour enfants dont il réussit à s’échapper. De retour à Kalymnos, il plongea donc pour survivre. Si Pêcheurs d’éponges est un précieux témoignage qui ne se prétend pas œuvre littéraire, il est cependant d’une grande justesse et rend hommage à ces hommes courageux, parfois happés par les requins mais qui, toujours, regardaient la mer en face. L’avant-propos de l’historien Daniel Faget éclaire avec délicatesse la vie et l’écrit de Yánnis Yérakis.   YER – 1er étage  

Bachisio ZIZI (1925- 2014) Les troupeaux de la colère (Serge Safran, 2016) (traduit de l’italien par Françoise Lesueur et Claude Schmitt)   Pietro le berger, le héros tourmenté et pauvre de l’écrivain sarde Bachisio Zizi, va de déboire en désespoir. Il vivote sur des terres arides. Son troupeau de brebis est volé. Arrêté, exilé par la force sur le continent, il continue à se battre, vainement. « Les jeunes finissent tous comme ça : émigrés, arrêtés ou exilés. Restent les femmes qui pleurent et les vieux qui récriminent. Tu n’es pas le seul, malheureusement. » Les pérégrinations picaresques de Pietro, dans un monde où « personne n’écoute les malheurs des autres, personne ne les comprend » nous touchent profondément.   ZIZ -1er étage

Et aussi …

James AGEE / Louons maintenant les grands hommes : Alabama : trois familles de métayers en 1936 (Plon ; Terre humaine, 2002) – 307 AGE

Florence AUBENAS / Le quai de Ouistreham (L’Olivier, 2010)                                 331.1 AUB

Jessica BRUDER / Nomadland (Éditions du Globe, 2019)                                        305.5 BRU

Didier ÉRIBON / Retour à Reims (Flammarion ; Champs : Champs. Essais, 2018)

                                                                                                                                                 305.5 ERI

Amy GOLDSTEIN / Janesville, une histoire américaine (Bourgois, 2019)             305.5 GOL

Richard HOGGART / La culture du pauvre : étude sur le style de vie des classes populaires en Angleterre (Éditions de Minuit, 2015)                                              306.4 HOG                  

Robert LINHART / L’établi (Minuit ; Double, 2008)                                                       331.2 LIN

Sylvain ROSSIGNOL / Notre usine est un roman (La Découverte ; La Découverte-poche. Essais, 2008)                                                                                                                331.09 ROS

Michel RAGON / Histoire de la littérature prolétarienne de langue française : littérature ouvrière, littérature paysanne, littérature d’expression populaire (LGF ; Le Livre de poche, 2005)                                                                                                                        840.9 RAG

George ORWELL / Le quai de Wigan (Climats, 2022)                                                828 ORW

Nina BERBEROVA / Chroniques de Billancourt : récits (Actes Sud, 1992)                      BER

Julien BOUISSOUX / Janvier (Editions de L’Olivier, 2018)                                                  BOU

Pascal DESSAINT / Les derniers jours d’un homme (Rivages, 2010)                                DES

Emmanuel DONGALA / Photo de groupe au bord du fleuve (Actes Sud, 2010)                         DON

Annie ERNAUX / Ecrire la vie (Gallimard ; Quarto, 2011)                                              848 ERN

Leslie FEINBERG / Stone butch blues (Hystériques & AssociéEs, 2019)                            FEI

Élisabeth FILHOL / La centrale (POL, 2010)                                                                              FIL

Aurélie FILIPPETTI / Les derniers jours de la classe ouvrière (LGF ; Le Livre de poche, 2005)                                                                                                                                                  FIL

Louis GUILLOUX / La maison du peuple (Grasset ; Les Cahiers rouges, 2007)               GUI

Louis GUILLOUX / Le sang noir (Gallimard ; Folio, 1980)                                                       GUI

Jennifer HAIGH / Ce qui gît dans ses entrailles (Gallmeister, 2017)                                  HAI

Sven HANSEN-LOVE / Un emploi sur mesure (Seuil, 2018)                                                HAN

Michel HOUELLEBECQ / Extension du domaine de la lutte (J’ai lu, 2010)                     HOU

Serge JONCOUR / Nature humaine (Flammarion, 2020)                                                   JON

Tadzio KOELB / Made in Trenton (Buchet-Chastel, 2018)                                                  KOE

Iain LEVISON / Trois hommes, deux chiens et une langouste (Liana Levi, 2008)         LEV

Jack LONDON / Le peuple d’en bas : récit (Phébus ; Libretto, 1999)                              LON

Sandra LUCBERT / Personne ne sort les fusils (Seuil ; Fiction & Cie, 2020)                    LUC

Constant MALVA / Paroles de mineurs (Omnibus, 2007)                                                 MAL

Karl MARLANTES / Faire bientôt éclater la terre (Calmann-Lévy, 2022)                        MAR

Harry MARTINSON / Même les orties fleurissent (Agone ; Marginales, 2001)               MAR

Jean MECKERT / Les coups (Gallimard ; Folio, 2002)                                                           MEC

Gérard MORDILLAT / La brigade du rire (Albin Michel, 2015)                                           MOR

Gérard MORDILLAT / Comment calmer M. Bracke (Calmann-Lévy, 2003)               MOR

Gérard MORDILLAT / Les vivants et les morts (Calmann-Lévy, 2004)                           MOR

Amélie NOTHOMB / Stupeur et tremblements (LGF ; Le Livre de poche, 2007)           NOT

Matthew Neill NULL / Le miel du lion (Albin Michel ; Terres d’Amérique, 2018)           NUL       

Antonio PENNACCHI / Mammouth (Liana Levi, 2013)                                                        PEN

Henry POULAILLE / Les damnés de la terre 1906-1910 : le pain quotidien (Les Bons caractères, 2007)                                                                                                                             POU

Laurent QUINTREAU / Marge brute (Denoël, 2006)                                                             QUI

Ralf ROTHMANN / Lait et charbon (Éditions Laurence Teper, 2008)                               ROT

Lydie SALVAYRE / La médaille (Seuil ; Points, 2004)                                                           SAL

Ousmane SEMBÈNE / Le docker noir (Présence africaine, 2002)                                     SEM

Morgan SPORTÈS / Ils ont tué Pierre Overney (Grasset, 2008)                                        SPO

John STEINBECK / En un combat douteux ; Des souris et des hommes ; Les raisins de la colère (Gallimard ; Biblos, 1989)                                                                                                          STE

Beat STERCHI / La vache (Éditions Zoé ; Domaine alémanique, 2019)                             STE

Jean-Loup TRASSARD / L’homme des haies (Gallimard, 2012)                                          TRA

B. TRAVEN / La révolte des pendus (La Découverte ; Culte fictions, 2007)                    TRA

Jim TULLY / Vagabonds de la vie : autobiographie d’un hobo (Les Éditions du Sonneur, 2016)                                                                                                                                           TUL

Maxence VAN DER MEERSCH / Quand les sirènes se taisent in Gens du nord (Omnibus, 1999)                                                                                                                                          VAN

Delphine de VIGAN / Les heures souterraines (JC Lattès, 2009)                                       VIG

Renea WINCHESTER / De l’autre côté des rails (Éditions Le Nouveau Pont, 2021)   WIN             

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Un commentaire sur “[Bibliographie] Littérature & vie ouvrière

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  1. Très beau travail, varie , je vais vite chercher un exemplaire papier à mon prochain passage à la Mediatheque.
    Merci

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